samedi 8 juin 2013

Peak all

Peak all.

Si vous n'êtes pas familier avec la notion de Peak All, référez vous à la notion du Peak Oil.

Non c'est pas mieux? :)

Voici.

Le Peak Oil, en français Pic Pétrolier, est le moment où la quantité de pétrole extrait commence à fléchir faute de réserves suffisantes pour assurer un débit adéquat.

Après le pic pétrolier il reste encore du pétrole mais celui-ci est de plus en plus coûteux à extraire et ne peut être extrait qu'en quantités de moins en moins importantes.

Au fond, c'est comme quand on boit un verre de lait frappé à la paille et qu'il reste de la mousse de lait au fond. Elle est là, accessible, on veut la boire mais il faut l'aspirer plus énergiquement que si c'était du liquide avec à la clé un bruit désagréable qui fait habituellement bien rire les enfants (et des adultes aussi). Beaucoup d'efforts d'aspiration pour cinq, dix fois moins de breuvage.

Le Peak All, c'est la même chose mais appliquée à l'ensemble des ressources que nous consommons. Cela signifie que beaucoup plus d'énergie et de travail seront requis pour extraire le minerai, les matières premières, le pétrole et pour au final en obtenir moins qu'avant. Beaucoup moins qu'avant. Il reste de tout mais la quantité finale produite ira en décroissant, cela pour une population qui continue à augmenter.

Ci-dessous se trouve un tableau qui illustre les dates de "fin" de chacune des ressources importantes.


Ainsi selon les estimations, l'or sera épuisé en 2025, l'argent en 2016-2017, le pétrole en 2048, le reste à l'avenant.

Déjà qu'on commence à vivre des pénuries d'hélium: ce gaz, non renouvelable, ne peut être produit par synthèse puisque, hé hé, c'est un élément. En fait on pourrait en "fabriquer" (plutôt transmuter une autre matière vers l'hélium) par bombardement de particules mais avouons que ça ne résoudrait rien puisqu'il faudrait de grandes quantités d'énergies pour y parvenir, énergie qui doit être produite ou captée elle aussi. 

Les conséquences concrètes d'un pic

Les conséquences d'un pic peuvent être assez catastrophiques selon la nature de la ressource en question.

L'or qui porte le symbole atomique Au, objectivement parlant, n'est pas très utile. Il est extrait, raffiné, fondu en lingots ou en bijoux et est essentiellement stocké pour être utilisé comme valeur de réserve. L'or prendra rapidement plus de valeur puisque la quantité globale d'or n'augmentera plus, et de loin, au même rythme que maintenant et sa demande connaîtra une plus grande hausse encore puisque sa rareté sera désormais absolue.

L'argent, au symbole atomique Ag connait en revanche une forte utilisation industrielle même si l'industrie de la photographie argentique a presque complètement disparue.

Sa raréfaction aura des conséquences catastrophiques. Les soudures des appareils électroniques sont réalisées avec de l'argent. Il faudra se rabattre sur un autre métal qui offrira une conductivité et une durabilité comparables ou à tout le moins suffisante. Pas évident! Comme environ 40% de la production d'argent métal est détruite annuellement par les besoins de l'industrie, c'est une pression qui sera transférée sur un autre métal.

Il est juste de dire qu'en général, on ne réalisera pas tout de suite les effets de la pénurie des ressources puisqu'on pourra souvent substituer une ressource par une autre.

Mais à la longue, il manquera de ressources quand même. Les prix vont augmenter et la disponibilité sera réduite avec le temps à une peau de chagrin. 

De quoi ça aura l'air?

Vous voulez avoir une idée précise de quoi une société en situation de Peak All aura l'air? Tournez vos regards vers Haïti! 

Haïti vit en situation de Peak All parce qu'il manque de capitaux pour acheter des ressources et parce qu'il n'en produit pas. Ce pays est donc constamment en pénurie de ressources. En effet puisqu'Haïti ne produit pas de ressources, n'a pas d'activité économique générant assez de revenus en devises fortes, il n'a pas les moyens d'acheter ce qu'il ne peut produire.

Haïti se trouve donc à être dans une situation de Peak All artificiel qui sert bien les besoins de la démonstration: ressources locales épuisées, ressources importées rares et chères pour sa population. 

Haïti, la Perle des Antilles, autrefois un paradis luxuriant est maintenant une surface plus désertique. Les forêts ont été pratiquement rasées car le pétrole et l'électricité sont trop chers pour sa population, donc rares et la population s'est rabattue sur le bois comme combustible pour la cuisson des aliments.

Cette déforestation massive démultiplie l'effet dévastateur des ouragans puisque la végétation restante ne peut plus maintenir la terre en place. Il se produit donc des torrents de boue après des pluies diluviennes, une boue qui diminue l'épaisseur et la quantité de terre arable et de fait, la quantité de nourriture productible localement.

Quand on ajoute à ce problème la rareté, pour cause de cherté, des fertilisants et des insecticides, on comprend que l'agriculture d'Haïti puisse être en piteux état. Oui, le facteur non négligeable de l'exportation alimentaire aggrave les pénuries locales ponctuelles et force les plus pauvres à manger des galettes de boue.

Autrefois un paradis de la bauxite, la matière première qui permet de fabriquer l'aluminium, les gisement s'épuisent. Il ne reste plus beaucoup de ressources exploitables sur cette partie de l'immense île Hispaniola et de ce fait, l'industrie moyenne et lourde est beaucoup moins développée qu'ailleurs. Oui ce pays est exploité dans le sens le plus vil du terme mais ça n'explique pas tout. Et d'ailleurs ils pourraient produire quoi localement? puisque les ressources sont généralement rarissimes...

Les infrastructures routières se sont dégradées avec les années et c'est normal puisque l'État n'a plus les revenus de l'industrie minière pour les entretenir, pour le peu qu'il en touchait. 

On pourrait faire une liste beaucoup plus grande des problèmes vécus par Haïti mais tel n'est pas le propos et mon intention n'est certes pas de salir Haïti ni son peuple qui ont été exploités par des régimes autoritaires successifs.

Bien entendu, Haïti ne vit pas vraiment le Peak All mais la Perle de Antilles vit comme si, en éprouve les effets.

Peut-on faire une adéquation entre la criminalité endémique de ce pays et les effets similaires au Peak All de son économie? Une chose est sûre: les élites intellectuelles ont quitté le pays dans les années 60 et 70, ceux qui avaient les moyens d'émigrer l'ont fait et ceux qui ne les avaient pas sont restés. Et comme les ressources sont rares, plusieurs prennent "les moyens qu'il faut"...

Il demeure qu'un pays qui connait le Peak All ou qui en vit l'équivalent des effets, peut se retrouver en très mauvais point.


À l'inverse...


Cuba! Rhum, musique, soleil, et Revolucion! Paradis des touristes, cette île voisine a connu l'équivalent des effets du Peak All dans les années 90 suite à l'effondrement de l'URSS (comme quoi ça arrive, des effondrements...).

Le régime en place, tout communiste qu'il était, n'a pas choisi la voie de la répression pour faire face à cette forme de Peak All qui la privait notamment de tout le pétrole dont le pays avait besoin.

Il a adopté des mesures fermes dont la plus importante était le "fort encouragement", voire même l'obligation, de cultiver tout ce qu'il était possible de faire pousser dans toutes les parcelles possibles, y compris les terre-pleins, les petites cour arrière, les balcons, les parcs publics.



Cuba avait déjà une habitude de récupération et de réutilisation. Quand aux USA on remplace plusieurs fois les flottes de taxi ou les voitures, les cubains eux les récupèrent, les réparent et les entretiennent.

Cette forme de résilience les a sauvés. La population cubaine a pu maintenir son alimentation et même améliorer son ordinaire de produits frais et sains, sans pesticides ni engrais chimique, par la force des choses. Elle a pu maintenir ses infrastructures dont son système médical universel qui fait sa renommée partout sur la planète. Bien entendu plein de choses ont été changées par la pénurie des ressources causée par l'incapacité de payer les importations. 

Ce pays a dû s'ouvrir au tourisme étranger et ainsi recevoir des flux importants de monnaie forte. 

Je dois maintenant dire que Cuba a "triché" dans sa manière de vivre le Peak All! Car ce pays a su compenser et rétablir un approvisionnement stable de ressources via le commerce mondial.

N'empêche que pendant plusieurs années, Cuba a dû faire face à une pénurie de ressources et en a survécu: le régime n'a pas été renversé, les gens ne sont pas morts de faim, l'état de santé général s'est maintenu et ils ont pu redémarrer quand les ressources se sont remises à entrer.


Suppositions

Si la planète entière vivait le réel Peak All, ou plutôt quand elle le vivra, à quoi pouvons nous nous attendre?


À ce que nous voyons actuellement: les grands ensembles économiques rivalisent actuellement sur toute la planète pour sécuriser leurs approvisionnements de ressources. 

La Chine qui produit 90% des Terres Rares nécessaires à la fabrication d'appareils électroniques a mis un embargo sur les exportations de ces ressources. "Heureusement", comme l'écrasante majorité des appareils électroniques sont fabriqués en Chine, nous n'en manquons pas mais nous devons leur acheter, à eux; la fabrication hors-Chine est devenue trop difficile à approvisionner en matières premières.

Et pourquoi assistons-nous à ça présentement? Parce que c'est commencé.

La phase suivante sera un déclin de l'activité industrielle et agricole, qui dépend massivement du pétrole.

Suivra une forme de déclin technologique et une baisse de la population mondiale.

Cela signifie que des gens, de grandes quantités de gens, vont mourir.

Ci-bas se trouve un graphique qui hélas a été confirmé récemment. Il illustre les tendances que nous avons connues et que nous connaîtront dans les prochaines années. Des mesures récentes indiquent que la réalité se conforme assez bien avec les prévisions. Les prévisions sont celles du Club de Rome, des gens impopulaires car ils disent la vérité.



Dans les trois décennies de 1970, 1980 et 1990, les lignes pleines représentent la réalité et les pointillées, les projections.

On remarque qu'on a utilisé plus de ressources non-renouvelables qu'anticipé, que la population a augmenté légèrement plus rapidement que prévu, tout comme l'économie de service et la pollution. La production de nourriture a nettement été plus abondante qu'estimé.


Par contre la production industrielle a moins performée.

La date charnière est 2030: c'est l'année où la population mondiale va commencer à décliner. Mais dès 2018-2020, la production industrielle va décroître et peu de temps après, la production alimentaire. Cette décroissance va s'effectuer plus rapidement que la croissance qui l'a précédée, avec les effets tragiques qu'on peut envisager.

2018, c'est dans cinq ans. Je le dis comme ça, au passage.

Alors il arrivera (ce qu'il arrive présentement) ce qu'il arrive à chaque fois dans l'histoire de l'humanité: les guerres pour les ressources. Autrefois on voulait conquérir des terres, puis diriger des humains pour les faire travailler à vil prix, désormais ce sera pour l'appropriation des matières premières.

On l'a vu au Moyen Orient et en fait partout où il y a du pétrole en suffisance puisque le pétrole est la clé de tout.

La récente intervention "anti-terroriste" de la France au Mali ne visait-elle pas à sécuriser, avec ses propres soldats, les opérations d'Areva, le producteur d'uranium? Ces mêmes terroristes combattus par la France au Mali sont armés et supportés par Elle en Syrie...

Nous devons nous attendre à en voir plus des comme ça.

Épilogue

Quoi dire? 

Ce que je, et plusieurs autres disent: faites des réserves, développez votre autonomie notamment par la culture du sol et la production de vos aliments, sécurisez un endroit à la campagne, devenez paysan et/ou apprenez des métiers. Et sachez vous défendre.

Il vous reste 5 ans.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire